Une semaine d’alpinisme en oisans

Une semaine d’alpinisme en oisans

Pic Nord des Cavales

5h du matin. Le réveil m’arrache violemment à la douceur de la couette et des mes rêveries nocturnes. Le temps d’attraper mon sac et quelques bricoles, me voilà dans la voiture, direction le Pas d’Anna Falque, pour aller rejoindre Alain au refuge du Pavé. En chemin, le hasard me fait recroiser la route de notre prof de Yogapero quelques jours avant à la Selle! La beauté du plan de Valfourche et la puissance énergisante de la Romanche me font presque oublier la lourdeur des jambes aujourd’hui, après trop de journées sans repos! C’est pour la bonne cause, en avançant notre programme d’un jour, on optimise nos chances de pouvoir traverser la Meije Orientale. Le risque orageux semble de plus en plus marqué au fil des jours.

Avec Alain, on ne compte plus les journées passées ensemble depuis maintenant 8 ans! Pour cette fois, nous revenons sur un vieux dossier! Il y a 2 ans, avec son fils Tristan nous butions sur le fil de la Meije orientale, repoussé par des corniches peu ragoutantes. Et la veille nous parcourions le Pic nord des Cavales dans des conditions pour le moins hostile, verglas, froid et visibilité nulle.

Rien de tout ça cette fois. Nous profitons tranquillement de la voie normale du Pic des Cavales, dans une tiédeur insolente! Les orages ne semblent pas presser de faire le spectacle, on déguste en papotant cette très belle escalade avec vue. Une petite sieste au sommet viendra conclure l’affaire. L’après-midi est dédiée à des activités non violentes au refuge du Pavé. Excellent accueil de Sophie qui tient à bout de bras cette cabane passablement défraîchie. La journée se termine par un puissant spectacle son et lumière comme chaque jour en ce moment.

Traversée de la meije orientale depuis le refuge du Pavé

Retour sur les lieux du but. Départ à 4h30 du refuge. Le pain et les confitures étaient tellement bon qu’on aurait pu rester une demi-heure de plus à se remplir le ventre! Nous gagnons en 2h le col du Pavé, plutôt surpris en bien par les conditions de neige. Nous franchissons la rimaye puis le premier ressaut en traversée, sans verglas cette fois! Nous rejoignons une cordée partie du Promontoire. Jusqu’à la brèche, pas besoin des crampons cette fois, quelques névés se franchissent facilement, sinon pour l’essentiel nous sommes dans le caillou. 3h après notre départ, nous voilà au soleil pour une bonne pause. Les choses s’annoncent nettement mieux que la dernière fois semble-t-il!

La suite de la course s’enchaîne à merveille entre sections effilées, terrain à chamois et vraies longueurs de grimpe! L’altitude est palpable pour Alain mais le bonhomme est robuste et à 9h30, après une dernière très belle longueur sur le fil de l’arête nous voilà au sommet de la Meije Orientale, nez à nez avec le Doigt de Dieu. L’émotion est palpable. La Meije ne laisse jamais indifférent! Les conditions parfaites nous invitent à flâner une bonne heure là haut! Encore un peu de concentration sur la descente où la glace pointe déjà son nez et nous nous échouons au refuge de l’aigle pour une nouvelle après midi dédiée à la non violence!

Doigt de Dieu par la voie normale

Pour clore nos 3 premiers jours, avant de descendre, nous profitons d’être déjà haut perchés pour gravir le Doigt de Dieu. Les rituels orages du soir, un peu plus froids que les jours précédents, ont déposé une 15aine de cm de neige. L’ambiance est magnifiquement immaculée… le soleil nous cueille à la rimaye… nous nous fumons les mollets dans les premières lueurs du jour! La longueur de rocher sous le sommet, couverte par endroit d’une carapace de glace, nécessite un peu de nettoyage… Et puis voilà, nous surplombons les Étançons depuis le Doigt de Dieu. Tout est parfait! Ne reste plus qu’une longue descente, rendue bien agréable aujourd’hui par la présence de neige jusqu’à environ 2400m…. c’est quand même bon quand ça glisse!

Arête sud Pointe Louise

Pour finir nos 5 journées avec Alain, nous retournons du côté du Glacier Blanc pour gravir la Pointe Louise, un sommet qui sonne particulièrement pour Alain.
Ca tombe bien, je n’ai jamais parcouru la classique arête sud, bien que je sois passé sûrement une bonne centaine de fois à ses pieds!! Nous sommes à l’attaque a peu près en même temps que le soleil… contrairement à l’arête sud du Glacier Blanc, où l’on peut louvoyer sur les flancs, celle ci se parcoure vraiment sur le fil! Le rocher est enthousiasmant, l’escalade jamais très dure avec quelques pointes dans le IV-IV+, et la vue sur la Barre grandiose! 2h après le départ, nous sommes au sommet de la Pointe Louise, un sommet bien moins fréquenté que certaines stars du secteur. La descente n’est pas tout à fait débonnaire, les raides pentes de neige demandent encore un peu d’attention… puis on se laisse descendre jusqu’au refuge du Glacier Blanc et un gueuleton bien mérité. Ainsi s’achève notre 8ème épisode et pas le plus vilain. Une semaine de rêve, loin des foules. Merci une fois de plus Alain pour ces bons moments en ta compagnie! La prochaine avec les fistons!

Traversée de la Meije Orientale

Traversée de la Meije Orientale

On ne mollit pas aujourd’hui avec Manu et Cyrille… L’idée est de rallier le refuge de l’Aigle en passant par la Meije Orientale. Le programme est ambitieux je le sais mais je commence à connaître un peu mes deux phénomènes et je ne doute pas d’eux! Nous prenons donc la direction du col du Pavé pour une petite mise en jambe matinale dans des pentes déjà un peu raides… Une petite longueur d’escalade au dessus de la rimaye qui nous permet d’accéder aux pentes de neige menant à la brèche Maximin Gaspard. La vue sur la suite laisse Manu dans une grande perplexitude qui nous gratifie régulièrement de : « vous êtes vraiment des grands malades, mais c’est quoi votre problème les gars? »… Même s’il dit non avec la tête, Manu dit oui avec ses pieds! Et se déjoue sans trop de problèmes de tous les pièges qui nous sont tendus sur cette belle course de grande ambiance! Cyril qui en mène un peu plus large se délecte de ce beau morceau d’Oisans sauvage offrant dans ces conditions des passages… intéressants! Notamment les courtes traversées de corniches, plus menaçantes du tout mais sur lesquelles il faut jouer avec son équilibre!

Heureusement que les crèpes de Louis sont là pour reconstituer son homme avant la descente vers la vallée!

Stage Barre des Ecrins

Stage Barre des Ecrins

Cette année Alain vient avec Tristan tout fraîchement en vacances! C’est la 4ème année que je pars en montagne avec Alain mais Tristan n’était pas revenu dans les montagnes depuis 2013 lorsque nous avions gravi l’Ailefroide Orientale et le Pelvoux

Voie Normale du Pic Nord des Cavales

Nous nous retrouvons au refuge du Pavé où nous serons les premiers passagers de l’année. Sophie la gardienne est en plein lancement du refuge. Le Pavé est un refuge vraiment atypique. Cette curieuse cabane en métal rappelant plus l’architecture des refuges soviétique que celle des chalets suisses, est devenu officiellement le refuge du Pavé après que celui ci ait été détruit par une avalanche l’année de son ouverture à quelques dizaines de mètres de là… La cabane est spartiate, vieillissante mais dans un cadre splendide au bord du lac du Pavé à plus de 2800m d’altitude, au pied de quelques géants des Ecrins : Pic Gaspard, Grande Ruine, Pavé… Sophie déploie toute son énergie avec succès pour rendre le lieu confortable et accueillant. Nous l’aidons dans les tâches quotidiennes rendues un peu plus nombreuses en ce début de saison bien enneigé…

Quel bonheur de démarrer la journée avec un bon petit déjeuner! Pain artisanal, confitures locales… avec une mention spéciale pour la confiture de marron! Aujourd’hui nous partons pour le Pic Nord des Cavales pour un petit galop de chauffe avant des projets plus ambitieux. Alain rêvait de monter sur cette belle pyramide au granit parfait qui malgré une altitude plus modeste que les « grands » d’à côté offre une vue insolite sur la Meije et les Etançons

La météo de la veille obtenue à la radio la veille nous gratifiait d’un laconique « beau temps ». Pourtant au réveil il bruine! Nous temporisons tranquillement et partons dès les premiers signes d’amélioration. Il reste de la neige sur l’itinéraire ce qui rend l’escalade plus délicate en particulier dans les dalles d’attaque. Ensuite nous suivons l’arête au plus prêt du fil pour éviter la neige. Nous atteignons le sommet sous la bruine qui a repris. La vue ne s’est pas franchement dégagée mais on aperçoit de temps à autre la Grande Ruine sortir des nuages et loin sous nos pieds le fond du vallon des Etançons… La Meije par contre nous cache ses dessous. Retour dans notre petit refuge pour une bonne omelette et un peu de repos pour être d’attaque… Faut dire que ce soir Sophie nous cuisine une croziflette! Et demain on se lève à 3 heures avec pour ambition de traverser sur le Refuge de l’Aigle par la Meije Orientale… Sans pression aucune évidement, si les conditions ne le permettent pas, nous rentrerons sur le Pavé

Brèche Maximin Gaspard et retour au Pavé : les corniches ça fait peur!

Au réveil il fait beau comme promis! La journée d’hier bien couverte n’a pas permis à la neige de transformer suffisamment… Le regel est superficiel et nous enfonçons à mi mollet en montant en direction du Col du Pavé… Sous le col, ça brasse plus! Les 100 derniers mètres plus raides sont un peu éprouvant. Malgré ça nous arrivons de bonne heure au Col du Pavé. La rimaye qui peut être délicate à franchir est aujourd’hui inexistante. Un court passage dans les rochers verglacés donnant accès aux pentes de neige nous réveille un peu! Au dessus les conditions dans les pentes qui mènent à la brèche Maximin Gaspard sont bonnes. La neige enfonce juste ce qu’il faut pour se sentir tranquille dans ces pentes à 45° et nous sortons rapidement à la brèche éblouit par le soleil. Le spectacle est splendide! Nous prenons le temps de savourer la vue dans cette montagne si belle en ce début de saison. La suite de l’itinéraire n’est pas gagnée du tout! L’arête est encore bien enneigée avec des corniches à plusieurs endroits. Nous commençons à suivre l’arête sur quelques mètres. Le soleil tape fort aujourd’hui et la neige, versant est, file facilement sous nos pieds. Les conditions me semblent trop compliquées et dangereuses pour notre cordée, demi-tour! Tristan et Alain accueille presque avec soulagement la décision! Nous redescendons donc les pentes en direction du Col du Pavé et nous replions sur une bonne omelette à Sophie avant de gagner la vallée!

Voie normale du Râteau ouest

Aujourd’hui, 4ème jour, nous profitons du téléphérique de la Grave pour gagner facilement de l’altitude avec pour espoir d’aller au Râteau ouest. La veille, pendant que nous faisions demi-tour à la brèche Maximin Gaspard, des cordées butaient au Râteau Ouest. Suspens! Dès les premiers pas sur le glacier, les sensations sont bonnes : on ne brasse pas! La journée chaude de la veille a bien tassé la neige et le regel est bon. Ouf, pas d’opération brasse coulée aujourd’hui! L’itinéraire est en condition quasi hivernale. La première partie est entièrement couverte par la neige. Pour éviter la neige chauffée du versant sud nous prenons une variante dans le haut de l’itinéraire qui consiste à rester sur le fil de l’arête. L’escalade est un peu plus difficile mais facilement protégeable et sur un caillou parfait. Nous rejoignons la voie normale au dessus et la suivons jusqu’au sommet… enfin presque! Une courte section cornichée nous barre les 50 derniers mètres horizontaux… on va tenter le diable d’autant que la vue d’où nous sommes est la même! Fait appréciable, le Râteau ouest est une des rares courses du sud des Alpes où l’on peut se poser à une terrasse de bistrot au pied de la voie!

Voie normale de la Barre des Ecrins : le jour de grâce!

Vendredi c’est relâche pour Alain et Tristan qui refond le plein d’énergie en vallée avant de remonter au refuge des Ecrins samedi pour tenter la Barre des Ecrins Dimanche. Le beau temps s’est installé et avec ça les bonnes conditions! La plupart des itinéraires ont été tracés et le regel est bon, du pain béni pour nous. Nous voilà le jour « j »! Jour de grâce! Tristan et Alain sont en pleine forme, acclimatés et techniquement affûtés! Nous partons parmi les premières cordées en direction de la Barre. On s’élève à bonne allure entre les séracs sur un manteau neigeux parfaitement portant, enfin! Nous atteignons la rimaye en même temps que les premiers rayons de soleil. Il n’y a plus personne devant nous et c’est tant mieux, je n’aime pas trop avoir des cordées au dessus de la tête! Les conditions dans la directe Coolidge sont justes parfaites : bonnes marches pour les pieds et neige dure pour les piolets… Deux ou trois pauses mollets plus tard, nous nous embrassons au sommet de la Barre. On partage tous les 3 ces beaux moments d’émotion. Pas un souffle d’air là haut, on s’attarde, on savoure. Tristan et Alain en reviennent à peine d’être là et contemplent autant qu’ils peuvent! Une fois rassasiés, nous prenons le chemin de la descente par la voie normale encore bien mixte, partie la plus technique de la journée. Nous remontons ensuite au Dôme, miraculeusement rien que pour nous en ce jour d’affluence… La journée parfaite!

Meije Orientale – Doigt de Dieu

Meije Orientale – Doigt de Dieu

Déjà la cinquième saison de guide et le plaisir de retrouver des « fidèles »!
Pour l’occasion je fais se rencontrer Antoine et Eve&Nico…

Nous allons du côté du refuge de l’Aigle où tout le monde trouvera des objectifs à sa portée!!

Passer une nuit à l’Aigle se mérite, il faut d’abord avaler les 1800m de dénivelé, ponctués de quelques passages d’escalade et d’un petit parcours glaciaire… L’avantage c’est que le lendemain, les sommets semblent tout proches!

Déjà 3 mois depuis le dernier passage à l’Aigle en ski, et toujours un accueil au top par Laura qui a troqué Louis contre Claire! Le charme des lieux serait inefficace sans des gardiens aux petits oignons!

Notre premier objectif du jour est de gravir la Meije Orientale. Je suis encordé avec Eve, Antoine mène l’autre cordée avec Nico. Je me charge de faire franchir à tous le monde la première pente de glace qui mène à l’arête… Canicule et sécheresse commence à se ressentir en haute montagne!!

Pourtant aujourd’hui un caillant vent de nord nous fait frissonner jusqu’au fond du caleçon et nous bouscule un peu sur l’arête… Du coup, on chôme pas! Sous le sommet, à l’abri de la calotte sommitale on arrive à se poser quelques temps… Ca change des longues siestes!!

Meije Orientale - A la montée Meije Orientale - Sommet Meije Orientale - Eve à la descente Meije Orientale - Le ressaut rocheux

La Meije Orientale était l’objectif pour Nico et Eve qui se rentre tranquillement au refuge.

Avec Antoine, mon Corse préféré, toujours en grande forme, on file jusqu’au Doigt de Dieu. Dans la pente au dessus de la rimaye, plus en glace qu’en neige, Antoine apprécie le deuxième piolet!

Meije Doigt de Dieu - Antoine dans la pente du Doigt de dieu Meije Doigt de Dieu - Antoine dans la pente du Doigt de dieu Meije Doigt de Dieu - Antoine dans la pente du Doigt de dieu

La longueur de IV en rocher n’est qu’une formalité pour Antoine (qui manque quand même d’y laisser un doigt! Au Doigt de Dieu, ça aurait été ballot!)…

Le vent s’est calmé, on profite un peu de ce sommet surplombant, fleurtant avec les 4000m…

Meije Doigt de Dieu - Antoine au Doigt de Dieu

Retour au refuge où Laura et Claire nous régale avec leurs crêpes copieuses…

Meije Doigt de Dieu - Le mythique perchoir de l'Aigle

Ce qu’il faut pour se mettre bien avant une descente un poil longuette!

Meije Doigt de Dieu - Et on file pour 1800m de descente

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