Suite de l’épopée Jebel Rum… La brave journée d’hier a laissé quelques traces dans les organismes… Le réveil est un peu douloureux pour certains ce matin mais la bonne humeur est là! Dans un élan d’enthousiasme, on se surprend à penser que l’itinéraire sera plus facile à trouver qu’hier et que l’on se rapprochera plus des horaires bédouins en solo… L’espoir fait vivre.
Il est 9h30 quand nous décollons et pour se mettre en jambe, nous traversons le Grand Siq. Chacun son truc. D’emblée on est replongés dans les mêmes acrobaties qu’hier. Dalles expos, désescalade, pas de IV+. En tous cas ce passage est bien sympathique et permet de gagner facilement les déserts d’Al Thalamiyah. Atelier inédit aujourd’hui : la grimpe sur arbre pour éviter un passage trop dur. Il faut monter sur les plus hautes branches qui ploient un peu sous la masse des envahisseurs! Juste après un très court pas de bloc verrait bien des larmes si les bédouins n’y avait pas taillé une salvatrice réglette (et poser un escalier bédouin)!
Chose incroyable qui ne nous est pas arrivé hier : nous venons de passer plus d’une heure sans se demander si on était sur la voie! Mais ça ne pouvait pas durer. Passée la fenêtre, c’est l’erreur! On se laisse hypnotiser par quelques kairns qui nous descendent dans un wadi vers l’W. Plusieurs voies se croisent à ce niveau, il faut être vigilant. Si hier les kairns étaient rares, aujourd’hui ils sont fourbes! Tout finit par rentrer dans l’ordre… pour quelques instants seulement! Difficile de se relâcher dans ces voies bédouines, il faut sans arrêt fouiner pour trouver le cheminement. Nous élaborons aujourd’hui la tactique dite du chien : je flaire devant et Ju et Jean ne me rejoigne que si c’est bon!
Ainsi je chercherait pendant une demi-heure le passage du grand Siq après la fenêtre. Ce canyon large de 50m et profond de 100 ne présente que peu de faiblesse. On commence par le longer vers l’E par des dômes. Mais ça commence à descendre pas mal et aussi loin qu’on voit, pas d’issue! On hésite à continuer : en effet notre petite expérience de ces bédouineries nous a appris que ce que tu descends tu dois le remonter en cas de but! On passe finalement au niveau du point haut du Siq par un passage impressionnant mais bien moins dur qu’il ne pouvait paraître de loin (comme c’est souvent le cas dans le secteur). Une fois de l’autre côté, nous longeons le Siq vers l’E et descendons des dômes jusqu’à un plateau. De là, on s’aperçoit qu’il était éventuellement possible de traverser le Siq à ce niveau. Pour piger, jetez un oeil au topo.
Petite hâlte au plateau, à l’ombre s’il vous plaît car aujourd’hui ça tape pas mal. Quelques kairns tentent de nous perdre mais nous ne laissons avoir que partiellement et trouvons la vire qui permet de gagner le haut du couloir d’Al Thalamiyah.
Mais pour nous ça ne s’arrête pas là. Après un court conseil de guerre et un bilan des provisions, la décision est unanime : on continue! On a plus trop d’eau mais c’est pas grave, on fermera la bouche! On rempile donc pour quelques heures de crapahute en direction du sommet N du Jebel Rum. Là le topo que nous avons devient vraiment limite, voire faux. La tactique du chien vit son heure de gloire! Passé le Jebel Nord, peu de difficultés (à l’exception d’un mur de 7-8 mètres à désescalader, avec des prises taillées) mais un itinéraire pas toujours fluide.
Nous hésitons pas mal de temps avant d’être certain de trouver le wadi Abu doud par lequel nous pensons nous échapper vers Rum. Une fois dedans nous n’avons plus de doute mais il aura fallu quelques explorations, une fine lecture de photo aérienne et un coup de boussole pour lever le doute. Une fois qu’on le sait évidemment, ça ne fait pas l’ombre d’un doute! Nous laissons donc tomber la dernière partie de la traversée : jusque là on s’amuse encore mais avec quasiment plus d’eau et la fatigue qui commence à s’installer, continuer pourrait transformer cette journée en une brave galère…
La descente par Abu doud nécessite encore pas mal d’attention dans les rampes mais l’itinéraire est facile à trouver et bien kairné. Enfin on gagne le wadi Bach et les signes de civilisation. Encore plus qu’après le trip Burdah, on a l’impression d’arriver dans une grande ville en débarquant à Rum, après 2 jours sans croiser âme qui vive. On s’échoue directement à la Rest House pour un bon petit gueuleton arrosé d’une bonne petite binouze, un met de luxe par ici!
Ce trip de 2 jours dans le Jebel Rum nous a vraiment marqué, autant (sinon plus!), que toutes les merveilles que l’on peut faire en escalade. Venir à Rum sans faire l’expérience d’une voie bédouine est un vrai sacrilège!
Ah, désolè, je n’avais pas vu cette deuxième partie… Tout complet, alors! Félicitations. Seuls quelques israéliens font en partie cette intégrale…
Pour moi, un des plus beaux trips en montagne.